Février 2020, n’était-ce pas la meilleure période pour partir en vacances en Afrique du Sud ?
Ce temps, loin sans l’être, où on se préoccupait plus d’Adèle au César et Virginie dans libération ! C’était quand même plus le fun qu’aujourd’hui 25 mars 2020, confiné chez soi avec des médias qui nous balancent H24 des images de mauvais film catastrophe…
Bref, c’est depuis chez moi, que je vais vous e-narrer la visite d’une très belle distillerie au sud du parc Kruger : La Mhoba rum distillerie !
On ne lit pas un article sans se préparer : Branche ta musique sur ta sono, lance le titre : Supernatural being d’Anbuley et tu peux poursuivre !
Mhoba veut dire Canne à sucre en Swahili, le dialecte local.
Cette distillerie a été créée en 2011 et a obtenu sa licence pour distiller en 2013. Le fondateur, Robert, est un ingénieur minier et propriétaire d’une mine dans la région. Fervent amateur de rhum (il a une collection impressionnante), il a voulu créer sa propre distillerie. C‘est lui qui a construit le moulin, la presse et les 3 potstills…
La matière première : la Canne à Sucre
Ici on utilise principalement la canne à Sucre du domaine (400ha), non traitée (pas d’engrais, ni pesticide) et non brulée pour conserver les levures naturelles des cannes
En Afrique du sud, il n’y a pas de saison particulière pour la coupe de la canne, elle pousse toute l’année même si la saison des pluies s’étend d’Octobre à Mars, ils sont donc en mesure de faire tourner la distillerie toute l’année si besoin est.
Le type de canne récoltée a été développé par le Sugar Cane Institute pour s’adapter au mieux au terroir. A Mhoba, on plante et on récolte la N57 et N54.
La canne est entièrement coupée à la main et est ensuite pressée en bas de la propriété tout à côté des champs de cannes.
Une fermentation très longue
La fermentation se fait dans des cuves semi-ouvertes avec des levures de boulanger, elle dure minimum 7 à 8 jours, ce qui est très long par rapport à ce qui est fait par les rhumiers agricoles en Martinique/ Guadeloupe… (en moyenne 24-48h). Après 2 jours, les levures de boulanger meurent et la fermentation naturelle prend le relai. Des morceaux de canne fraiche sont alors ajoutées pour apporter des levures naturelles.
Pour son High Esther rum, la fermentation est poussée jusqu’à 21 jours pour développer des arômes très spécifiques…
La distillation discontinue en potstill
Robert a construit 2 strip stills (chauffes vin qui font monter en température et en degré d’alcool le vin de canne, de 5/7° à 12/14°, et le prépare ainsi à la distillation), et un pot still de 500L.
Les rhums sont redistillés si nécessaire (double distillation, souvent pour les rhums destinés au marché local). Cette installation leur permet de travailler par batch (par alambique) qui sont ensuite assemblés par Robert.
Lors de chaque distillation, le rhum sorti de l’alambique est récupéré dans des bonbonnes de 12L préalablement numérotées.
En début de distillation, les tètes sont mise de côté, puis le rhum coule dans la bonbonne n°1, puis la 2, la 3 etc. ce qui leur permet d’obtenir des sortes de sous batch à degré alcoolique et structure aromatique différents à chaque distillation !
Un vieillissement décomplexé : cask ou Stave !
Chez Mhoba, on utilise 2 méthodes de vieillissement :
- Un vieillissement classique en fût : ancien fût de bourbon, de whisky d’Afrique du sud et des anciens fut de vin en chêne français. Chaque fût reçu au chai est entièrement démonté et nettoyé au sable puis remonté et retoasté.
- Un vieillissement en Glass cask (dame jeanne) dans lesquelles des douelles de bois (lattes qui constituent les fûts) toastées au barbecue à la distillerie sur les 4 faces, sont ajoutées dans la dame jeanne avec le rhum.
Les vieillissements sont courts mais se font très rapidement, je n’ai pas reçu l’information sur la part des anges (ndrl : le % d’évaporation du rhum des fûts par an qui est relatif à l’échange entre le rhum/le bois et l’air, et donc proportionnel à la vitesse de vieillissement), mais j’imagine qu’elle est très élevée aux vues du résultat à la dégustation des rhums de 1 an (sur le papier jeune, mais déjà très expressif, boisés, épicés…).
Embouteillage fait maison
Les étiquettes sont imprimées à la distillerie ou gravées au laser (pour celles en bambou) puis collées à la main.
On parle donc d’une distillerie qui travaille de la canne à la bouteille en contrôlant chaque étape de production de leur rhum
Dégustation de la gamme des blancs au vieux
Chez Mhoba, c’est 100% naturel, il n’y a pas d’ajout de sucre pour la douceur ou de caramel pour la couleur, les rhums sont bruts !
Les blancs :
White 43% – un rhum léger, relativement doux, l’entrée de gamme destinée au marché local
Select Reserve 58% – ils sélectionnent pour ce rhum, les meilleures parties des distillats et les assemblent. Chaque bouteille est numérotée. Le résultat est gras et très aromatique avec des notes de solvant, vernis à ongle, cela se rapproche d’un jamaïcain high esther…
High esther 66,5% : la fermentation plus longue de 21 jours apporte des arômes particuliers au rhum. Pendant la distillation, il ajoute le « dunder » – ce qui reste dans le potstill après distillation (très riche high esther et donc en arôme) – au jus de canne au moment de la fermentation. Sucré au nez, il tient ses promesses, plein d’arômes, mon coup de cœur parmi les blancs !
Les vieux :
Dark 43% : vieilli 6 mois par la méthode « stave ageing » (avec des douelles de bois), en dame-Jeanne. Ce rhum est très boisé et sec. Il est réservé au marché local.
Aged rum : vieilli d’abord en dame jeanne par la méthode « stave ageing », il est ensuite mis en vieillissement dans des fûts de chêne américain (ex-whisky). Ce rhum est très boisé, légèrement épicée.
Pineapple/ ananas : ce rhum est un assemblage entre du glass cask rum et de 2 rhums blancs infusés pendant 3 mois avec des morceaux d’ananas toastés. Le résultat est très intéressant, des notes subtiles fruitées (ananas), et très légèrement sucré. Mais si on ne m’avait pas dit qu’il était infusé à l’ananas, je ne sais pas si je l’aurais deviné immédiatement…
Strand 101 : c’est Knud Strand (leur partenaire commercial et grand amateur de rhum) qui leur a soufflé l’idée d’assembler un rhum blanc high esther de 2 semaines de fermentation (et non 3 comme le High Esther) avec le glass cask rum. Il en résulte un rhum vif très distinctif avec des notes gourmandes de vanille, caramel, chocolat !
Les 2 flagships de la maison, reconnaissables avec leurs étiquettes en bambou :
Glass cask 65% : uniquement vieilli en dame jeanne avec des « staves », pendant un minimum de 2 ans. Au nez, il parait plus doux, assez boisé en bouche avec des notes épicées. Une belle complexité que je ne saurais correctement décrire… long final…
French oak cask : Vieilli désormais pendant 2 ans dans d’anciens fûts de vin (chêne français -totalement nettoyés et rebrulés) – une très belle vivacité et un long finish malgré son jeune Age (1 an)
Au Final, un rhum avec un ADN très particulier qui se rapproche des rhums Jamaïcains, présentant notamment des notes mentholées, de solvant, que l’on distingue bien dans chacun de leur rhum !
Je remercie infiniment le staff de Mhoba pour leur disponibilité et leur accueillant chaleureux !
Un véritable partage de savoir-faire !
Une distillerie aussi transparente et innovante, située dans un paradis sur terre, que demander de plus « to RUM the WORLD »…
#staysafe #stayathome
Kiss kiss boum boum
Lolo
